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Le 1 Novembre 2021

Les études à L’Institut

La sortie du livre « À l’ombre du grand cèdre. Histoire de l’Institut biblique de Nogent (1921-2021)» écrit par Anne Ruolt est l’occasion de revisiter le projet pédagogique de notre école. Voici quelques pages légèrement adaptées de l’ouvrage qui abordent ce sujet

(p. 378-384).

En 1988, le rapport moral exposé par Bernard Huck à l’AG présente le fruit de la réflexion des professeurs réunis le 11 mars 1985. Celui-ci résume la spécificité de l’Institut qui, selon eux, consiste en : « Une formation biblique, de théologie fondamentaliste (dans le bon sens du terme) mais aussi une formation spirituelle, humaine (vie communautaire et de piété) et pratique (initiation aux ministères) »2. Alors qu’il n’y avait en 1984 aucune condition de diplôme préalable pour commencer les études (ce qui est toujours le cas aujourd’hui), le CA de l’Institut se posait la question d’un « examen d’entrée sur les matières bibliques, voire une année préparatoire ». Cette mauvaise connaissance biblique de nombreux étudiants s’expliquait et s’explique toujours par un manque d’enseignement biblique dans les Églises3. Les réflexions menées en 1988 par Paul Sanders, autour d’un projet pédagogique » envisageaient d’étendre à quatre ans le programme d’étude plus exigeant pour répondre aux nouveaux besoins des Églises et des œuvres, insistant sur le degré de la motivation des élèves. « Beaucoup d’étudiants sont prêts à entrer dans les grandes écoles, connaissant les difficultés qu’ils vont rencontrer parce qu’ils sont motivés » affirmait-il, ajoutant « Cette motivation est bien sûr liée aux diplômes qu’ils obtiendront en fin d’études »4.

Dix ans plus tard, en 1998, Gauthier De Smidt présentait la visée de la formation à l’IBN en termes de maturité à acquérir. Il disait :

Si le savoir est un des buts de la formation, nous croyons aussi à l’importance des contacts, au partage des joies et des peines, aux temps des repas et de la détente, aux entretiens et à la prière en commun. C’est aussi ainsi que nos étudiants acquièrent une maturité5.

Ce qui suit recense plusieurs « moyens institutionnels » développés pour atteindre cet objectif de maturité autant dans la maîtrise des savoirs que dans l’exercice pratique et la vie quotidienne.

PÉDAGOGIE POUR FORMER LE CARACTÈRE

UNE PÉDAGOGIE VARIÉE, CENTRÉE SUR L’ENSEIGNANT ET LES CONTENUS

L’Institut n’a pas directement souscrit et développé les principes de la « pédagogie active », mettant l’élève au centre du processus. Des trois pôles en tension du triangle pédagogique de Jean Houssaye, l’enseignant, les savoirs et l’élève, où deux sont naturellement privilégiés au détriment du troisième qui « fait le mort » pour reprendre l’expression originelle, c’est d’abord la relation de l’enseignant aux savoirs à transmettre qui a été privilégiée. Le montre le premier des critères de recrutement des professeurs ou des chargés de cours, celui d’être en conformité avec les doctrines fondamentales de l’École. Ce n’est cependant pas le seul critère. Le second est celui de ses qualités humaines et pastorales, afin de servir de guide ou de « modèle » inspirant pour former des disciples. Ce processus de formation est représenté par la relation enseignant – élève du triangle pédagogique. Par contre, le processus d’apprentissage, représenté par la relation de l’élève aux savoirs, cher aux promoteurs de l’éducation nouvelle, a été le moins privilégié. L’élève est supposé avoir déjà « appris à apprendre ». La réputation de l’Institut, à ses débuts, s’est surtout faite sur l’aura et le rayonnement de ses premiers professeurs et de son directeur. Le modèle pédagogique a davantage été « enseignant-centré » puis « curriculumo-centré », lorsque l’institution a cherché à adopter les normes imposées par l’Association Évangélique Européenne d’Accréditation, même si celle-ci prenait davantage en compte le processus d’apprentissage des élèves.

J. M. Nicole a pourtant pratiqué la « classe inversée », avant qu’elle ne redevienne récemment à la mode, mais peut-être comme M. Jourdain pratiquait la prose, en l’ignorant, et en utilisant cette méthode pour gagner du temps sur ce qu’aurait exigé un cours magistral. Il avait plutôt fait sienne la formule de Ruben Saillens qui affirmait que « ce qui est neuf est rarement bon et ce qui est bon est rarement neuf » En quoi consistait ce mode d’enseignement ? Plutôt que d’exposer un cours de doctrine de façon magistrale et d’imposer à l’étudiant de prendre des notes, pour ensuite assimiler le cours et se présenter à un examen vérifiant l’acquisition des connaissances, le cours, dans le modèle dit de la « classe inversée », est bâti sur une série de questions, livrées à l’élève en amont du cours. C’est en quelque sorte l’étudiant qui prépare le cours en cherchant les réponses par lui-même. Le cours en classe s’organisait alors de la façon suivante : M. Nicole égrainait les questions en interrogeant au hasard un étudiant — honte à lui s’il n’avait rien préparé ! mais bienheureux celui qui était interrogé lors du premier cours, il était tranquille pour un petit moment—, celui-ci lisait ce qu’il avait préparé, puis le professeur corrigeait et complétait en structurant logiquement la réponse, et répondait aux questions que le sujet avait suscitées. Cette méthode favorise l’autonomie de la recherche « par soi- même », l’interaction adaptée aux questions de la classe et le travail d’apprentissage régulier, si… les élèves jouent le jeu et ne reprennent pas le travail de préparation effectué par un de leurs camarades ! Était-ce un choix pédagogique délibéré, ou était-ce un choix par défaut, pour survivre à la charge d’enseignement si variée qui fut celle de J. M. Nicole ? En tout cas, l’habitude a perduré chez M. Nicole lorsque ses différents « Précis » ont été publiés, faisant la synthèse de ses cours. Aujourd’hui si les questionnaires subsistent dans certains cours, ils sont souvent conçus comme une aide destinée à guider l’élève vers ce que le professeur veut qu’il sache restituer le jour de l’examen. L’étudiant y répond après le cours pour se préparer à l’examen, lequel consiste à être capable de répondre, sans ses notes, à une de ces questions tirées au sort.

Article en intégralité dans le n°192 de l’IBphile